Troubles musculosquelettiques, fatigue visuelle et cognitive, postures sédentaires… Le travail prolongé sur écran expose à des risques pour la santé. Lorsqu’il est exercé à domicile, majoritairement sur un ordinateur portable, une vigilance particulière doit être portée, par l'employeur et le salarié, à l’aménagement de l'espace de travail.
Troubles musculosquelettiques, fatigue visuelle et cognitive, postures sédentaires… Le travail prolongé sur écran expose à des risques pour la santé. - © Gaël
« Les ordinateurs portables n’ont pas été pensés ni conçus pour que l’on travaille dessus à longueur de journée sans équipements complémentaires. » Cette mise en garde de Laurent Kerangueven, expert d’assistance-conseil à l’INRS, mène rapidement au constat que ces outils de travail, incontournables dans le quotidien de nombreux travailleurs mais imaginés au départ pour des usages mobiles, ne sont pas adaptés pour du travail de bureau sur des journées entières. Pourtant cet outil informatique demeure très souvent l'équipement de base dans la mise en place du télétravail, dont le déploiement s'est largement accéléré ces cinq dernières années. À partir de là, se pose la question des conditions dans lesquelles le travail à distance est mis en œuvre. Car « les ordinateurs portables ne permettent pas de répondre aux préconisations en matière d’aménagements de postes de travail informatisés », poursuit l’expert. En effet, la taille de l’écran, la proximité entre le clavier et l’écran font que, par sa conception même, un ordinateur portable seul ne permet pas un aménagement optimal.
Dès lors, comment aménager son poste à domicile pour travailler avec la meilleure configuration possible ? Les règles de base d’aménagement d’un poste de travail s’appliquent de façon identique au bureau et à domicile. Même dans un environnement qui n’a pas été initialement prévu pour une activité professionnelle, il est généralement possible d’aménager son espace de travail afin de limiter les risques de troubles musculosquelettiques ou de fatigue visuelle.
Écran et clavier déportés
Pour commencer, il est important d’avoir un clavier et un écran déportés, reliés à l’ordinateur portable qui peut alors faire uniquement office d’unité centrale. En effet, sur un ordinateur portable, l’écran et le clavier étant liés, soit l’écran est trop près des yeux – et trop bas par rapport au regard – pour que les bras et les mains soient correctement positionnés, soit il est à bonne distance mais c’est alors le positionnement des bras – qui se trouvent tendus – qui risque de créer des tensions dans le haut du dos, les épaules et les membres supérieurs. Les générations d’ordinateurs 2-en-1, ou tablettes pro, avec écran tactile et clavier qui se désolidarise de l’écran, compensent quelque peu ces contraintes, mais doivent être positionnées suivant les mêmes principes. L’écran, lorsqu’il est déporté, doit être placé à une distance de 50 à 70 cm des yeux, avec le haut de l’écran qui se situe sous l’axe horizontal des yeux. Et le choix de l’écran doit se faire en fonction des caractéristiques de l’activité exercée. Enfin, il est important de veiller à avoir un éclairage suffisant et d'éviter les reflets sur l'écran.
Si l’essentiel du travail se fait à partir de documents papier, installer un porte-documents à proximité immédiate de l’écran – au niveau du regard – peut être plus confortable. Faute d’avoir un écran déporté, il est recommandé de surélever l’ordinateur portable pour que le haut de l’écran soit au niveau des yeux. Il existe des supports inclinés, facilement repliables permettant d’atteindre cet objectif. À défaut, de gros livres empilés peuvent rehausser de façon stable l’ordinateur portable à la bonne hauteur. Il est alors indispensable d’avoir un clavier externe ainsi qu’une souris déportée à disposition.
La position préconisée pour un poste de travail à domicile
En fonction de la nature de l’activité, l’utilisation de plusieurs applications métiers est parfois nécessaire, il peut être conseillé d’opter pour l’emploi de deux écrans. En présence d’écrans multiples, veillez à faire en sorte qu’ils présentent des caractéristiques d’affichage similaires, tout en étant à la même distance des yeux. Ponctuellement, l’ordinateur portable peut être utilisé en écran secondaire, en complément d’un écran fixe. Il pourra alors être utile de le placer sur un support incliné afin qu’il soit à la même hauteur que ce dernier. Le clavier doit, quant à lui, être positionné à 10 à 15 cm du bord du plan de travail. La souris est à placer dans le prolongement de l’avant-bras, au plus près du corps. Le réglage du plan de travail a par ailleurs son importance : idéalement, sa hauteur doit être ajustée pour permettre d’avoir les épaules bien relâchées, et que l’angle des coudes soit entre 90° et 135°.
Une responsabilité de l'employeur
En matière d’assise, il est important d’avoir un siège idéalement muni de réglages permettant notamment de poser les pieds à plat au sol, avec les cuisses horizontales ou légèrement plus hautes que les genoux. Ceux-ci doivent former un angle droit ou légèrement supérieur, sans que l’assise du siège ne comprime l’arrière des genoux. Si le siège n’est pas réglable en hauteur et ne permet pas de respecter ces principes, l’ajout d’un repose-pieds s’avérera utile. Le bas du dossier doit épouser la courbure naturelle du dos.
Les employeurs demeurent réglementairement responsables de la préservation de la santé et la sécurité de leurs salariés au travail, quel que soit le lieu où celui-ci est effectué. Depuis quelques années, de nombreux accords d’entreprises « télétravail » sont signés afin d'encadrer et d'organiser les conditions d’exercice du travail à domicile. Dans certains cas, ils prévoient la mise à disposition d'un matériel adéquat, ou parfois d'une aide financière à l’achat d'équipement afin d’assurer la réalisation du travail à domicile avec la meilleure configuration possible.
LUTTER CONTRE LES POSTURES SÉDENTAIRES
Qu’il s’agisse de travail au bureau ou à domicile, il reste essentiel de varier régulièrement les postures tout au long de la journée pour lutter contre les risques liés aux postures sédentaires. Faire des pauses courtes mais régulières, en profiter pour se lever et faire quelques pas, est une première solution. Se mettre debout pour la réalisation de certaines tâches : les appels téléphoniques qui ne nécessitent pas de prise de notes ou d’outil informatique sous les yeux, le suivi de visioconférences, et ce, en ajustant là aussi la distance et la hauteur de l’écran de l’ordinateur. Il est également possible d’opter pour des alternatives aux sièges de bureau, sous la forme d’assises dynamiques (swiss ball, ergocyle…). En n’oubliant pas qu’aucune posture n’est idéale de façon prolongée, et que l’important est d’alterner régulièrement les postures.